Pôle cold cases : bientôt une centaine d'affaires, des familles "enfin entendues"

[Article] A year after its creation, France's cold case unit working on almost 100 cases.


Pôle cold cases : bientôt une centaine d'affaires, des familles "enfin entendues".

Nanterre (AFP) - Un an après sa création, le pôle national "cold cases", dédié aux affaires non élucidées, atteindra sous peu la centaine de dossiers et a ravivé l'espoir de nombreuses familles de victimes soulagées "d'être enfin entendues" par la justice.

Cette division inédite, installée le 1er mars 2022 au tribunal judiciaire de Nanterre (Hauts-de-Seine) en banlieue parisienne, s'attaque à des affaires parfois vieilles d'un demi-siècle qui ont résisté aux enquêteurs des quatre coins du pays.

Elle a pour ambition de contribuer à la constitution d'une mémoire criminelle nationale, puis européenne, afin de "favoriser les rapprochements entre des faits criminels commis dans plusieurs pays européens", a détaillé le pôle dans un communiqué adressé lundi à l'AFP.

Au cours de l'année écoulée, le pôle a analysé plus de 200 dossiers afin de déterminer s'ils pouvaient leur apporter une "plus-value". Ont été retenus des crimes sériels, des enquêtes exigeant un haut niveau de technicité, des affaires aux enjeux internationaux...

Par exemple, les 90 tomes sur la tuerie de Chevaline, quadruple meurtre au retentissement international ayant eu lieu en 2012 dans les Alpes, ont été transmis à Nanterre.

Sur 222 enquêtes examinées, 77 procédures ont été ouvertes par le pôle : 67 informations judiciaires, réparties entre trois cabinets d'instruction, et 10 enquêtes préliminaires, dirigées par le parquet.

Dix-neuf de ces procédures avaient cessé de faire l'objet d'investigations : Nanterre les a relancées.

Le pôle est parvenu à "redonner l'espoir aux familles d'être enfin entendues", a salué auprès de l'AFP Corinne Herrmann, avocate qui représente des familles dans dix dossiers transmis à Nanterre.

Même constat pour son confrère Didier Seban, qui déplore toutefois "le mépris abyssal" de certaines juridictions locales "bloquant" la transmission de dossiers. Une résistance d'autant plus regrettable, selon lui, que Nanterre fait preuve d'une vraie "volonté d'avancer et de résoudre les affaires".

- Eviter "l'effet tunnel" -

Début février, la juge d'instruction chevronnée Sabine Kheris, coordinatrice du pôle, a notamment terminé ses investigations dans trois dossiers liés au tueur en série Michel Fourniret, décédé en 2021, et à son ex-épouse Monique Olivier.

La fin des investigations ouvre ainsi la voie au premier procès de la division "cold cases", si Monique Olivier, mise en examen pour complicité, est bien renvoyée aux assises.

Actuellement, 47 affaires du pôle concernent des meurtres, 16 des enlèvements et/ou séquestrations et 5 des viols. Par ailleurs, 51 concernent exclusivement des victimes femmes et près d'un tiers des mineurs.

Pour maintenir "un niveau raisonnable" d'enquêtes à mener, le président du tribunal Benjamin Deparis et le procureur Pascal Prache ont prévenu que "le pôle ne pourra absorber plus d'une centaine de dossiers, en l'état des moyens alloués". "Ce niveau sera atteint très prochainement au regard des affaires en cours de dessaisissement ou à venir", ont-il ajouté.

Les deux magistrats ont toutefois assuré que le pôle continuerait sa "montée en puissance" en 2023 : l'ouverture de la salle des scellés a été repoussée mais doit être effective en avril, tandis que deux officiers de liaison spécialisés sont en train d'être recrutés.

Surtout, le pôle se distingue par ses méthodes de travail.

La juge Sabine Kheris écume les laboratoires en quête d'expertises innovantes afin d'éviter "l'effet tunnel" du juge "seul dans son coin", expliquait-elle lors d'un colloque en novembre.

La "transversalité" est au coeur des stratégies d'enquête: expertises ADN, approche comportementaliste du passage à l'acte, élaboration de cartes mentales... Le pôle a aussi indiqué développer "le partage d'expertises juridiques et scientifiques" avec d'autres pays, comme les Pays-Bas et les Etats-Unis.

Par ailleurs, neuf enquêtes du pôle ont la particularité de s'appuyer sur un nouveau cadre procédural, lancé en décembre 2021, celui du "parcours criminel".

Dans ces cas-là, le magistrat enquête non pas sur des faits précis mais retrace le parcours de personnes ayant été condamnées par le passé (Nordhal Le Landais, Pascal Jardin, Patrice Alègre...), à la recherche d'autres victimes potentielles.

This article was published Thursday, 2 March, 2023 by AFP
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Des gendarmes à la recherche d'indices après la tuerie de Chevaline à Talloires en Haute-Savoie le 18 février 2014 © AFP JEAN-PIERRE CLATOT


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